Saisons

Eté – Automne 2021. Votre regard me rend à moi-même*

Photo Nazim Djemai — Nazim Djemaï - 1977 / 2021. (Photographie : Mohamad Reza Zandian)

Phrase écrite par Marylène Negro pour la voix off de son film You I Tourneur.

« Je pense qu’il faut pirater, magnétoscoper, il faut refaire une culture, faire des bibliothèques, des abbayes de Thélème, il faut s’organiser. »
Serge Daney, La maison cinéma et le monde, vol 4, Le moment Trafic, 1991-1992

C’est le passage de l’été à l’automne, deux-mille-vingt-et-un. Nous avons eu quinze ans, et depuis plus d’une année maintenant, nous reprenons le chemin d’une vie collective, basée à Marseille, faite de rencontres régulières entre nous, pour alimenter, sans fins, les dérives. Pour enrichir ce qui nous relie, dans les replis de l’histoire du cinéma, dans les oeuvres amies, trop peu vues, trop vites effacées, qui peuplent pourtant notre monde, et qui se retrouvent ainsi tissées entre elles, dans ces archives patientes que nous constituons, quelque part, contre l’oubli.

La période traversée aura vu l’avènement de la diffusion virtuelle du cinéma, et face à elle, l’inquiétude des salles fermées. Par-delà bien d’autres horreurs politiques, le contrôle qui pèse sur nos vies va grandissant, et de là où nous sommes, il nous importe que les images continuent d’être partagées, dans des lieux bien réels, dans la vie des regards et des discussions, qu’elles génèrent. Qu’elles nous fassent, aussi, ainsi, prendre position. Cette rentrée est donc pour nous l’occasion de reprendre le chemin des salles. Régulièrement, nous proposerons des séances, dans des lieux qui défendent ce en quoi nous croyons – comme Le Polygone Étoilé, ou Vidéodrome 2, à Marseille – pour partager, tels des montages avec les spectateurs, des éléments des constellations que le site accueille au fil des saisons. Des lieux, qui ne dissocient pas le cinéma de sa fabrication, de son économie, de sa pensée, et de celles et ceux qui le maintiennent vivant. Le 7 octobre, nous rendons hommage à notre ami Nazim Djemaï, cinéaste disparu cet été. Dans un entretien au journal El Watan, il disait, avec toute l’exigence et la croyance qui le caractérisait : Les images sont faites pour que le spectateur puisse les ressentir. Il doit se réapproprier tout cela. Et moi, je ne peux lui donner une piste car cela ne lui permettra pas d’avancer et de répondre à ses propres questions. Il faut lui donner du temps pour s’installer dans un plan. Il ne peut que s’accrocher à lui-même.

En écho, hors du temps, dans une conviction qui reste furieusement contemporaine, nous nous attaquons également au chantier du partage des archives et travaux du cinéaste Renaud Victor, injustement ignoré. On peut lire ces mots, en introduction de la constellation où nous assemblons les premiers documents (d’autres sont à venir) qui lui sont consacrés : Ce sont des histoires d’amitié qui nous permettent d’avancer, où chacun engage sa peau, son fric, son temps, c’est loin d’être simple et il est important de tenir. Et si l’image semble nous appartenir un peu parce qu’on a sué pour la rendre visible, on n’en sera en tout cas jamais propriétaire.

Cela résonne avec les propos de Daney. Continuons de construire nos archives, dans des chemins de traverses qui n’ont comme seule loi, que le partage de ce qui nous rend à nous-même, et plus aptes à être au monde, là où le cinéma peut, quelque chose qui lui restera toujours singulier.

Nous remercions également Aude Fourel, qui a choisi de mettre l’intégralité de ses films sur Dérives, disant qu’en cela, ils seraient moins seuls. Et nous sommes heureux de partager les fruits d’une longue correspondance collective avec Marylène Negro, qui elle aussi, nous avait écrit son désir que ses films puissent exister autrement, dans l’espace qui nous anime.

Nous espérons vous voir, prochainement à Marseille :

Le jeudi 7 Octobre, à 20h, au Videodrome 2, pour une soirée consacrée à Nazim Djemaï :
Il n’y a pas de fin. Il ne peut y en avoir.

Aussi, nous partagerons collectivement, un montage d’éléments de cette saison,
le Vendredi 22 Octobre, au Polygone Etoilé, à 20h :
Votre regard me rend à moi-même

*
Constellation Marylène Negro

Correspondance à trois (et filmographie partielle)
Par Marylène Negro, Manlio Pedrotti et Lo Thivolle, 2021

*
Constellation Aude Fourel

D’où venait-elle ? Où allait-elle ?
Texte de Aude Fourel, 2017

Pourquoi la mer rit-elle ?
Film de Aude Fourel, 2019

Attraversare Roma
Film de Aude Fourel, 2013

ST#3
Film de Aude Fourel, 2014

ST#2
Film de Aude Fourel, 2012

ST#1
Film de Aude Fourel, 2011

*
Constellation Renaud Victor

Entretien avec Renaud Victor
Propos recueillis par Christine Delorme, septembre 1991

De jour comme de nuit
Dossier de presse du film de Renaud Victor, 1991

Le Meilleur de la vie
Dossier de presse et entretien avec Renaud Victor, 1984

Hé ! Tu m’entends…
Dossier de presse du film de Renaud Victor, 1980

*
Constellation Nazim Djemaï

Entretien avec Nazim Djemaï
Par Samir Ardjoum, 2010

Nazim Djemaï : une constellation filmique
Enregistrement sonore des interventions de Robert Bonamy, Ikbal Zalila, David Yon et Jean-Claude Rousseau, septembre 2021

*
Constellation Hailé Gerima

Dialogue avec Hailé Gerima
1977

Hour Glass
Film de Hailé Gerima, 1971

*
Constellation Bruno Dumont

Entretien avec Bruno Dumont
Propos recueillis par Julien Pichené et Laurent Devanne, 2003

29 Palms. Note d’intention
Texte de Bruno Dumont, 2002

*
Constellation les 50 ans du CJC

Ma rencontre avec le Collectif Jeune Cinéma
Texte de Cécile Ravel, juin 2021

Mais qu’est-ce que je fais au CJC ?!
Texte de Frédéric Tachou, 2021

*
L’avènement du cinéma direct

Entretien avec Joris Ivens
1964

Entretien avec Pierre Lhomme
1974