Les films de Véronique Goël

Texte de Stephen Dwoskin, 1989

 

Les films de véronique Goël sont comme des tranches de mémoire taillées dans un langage cinématographique solide. Entre les lignes de ce langage, sa lucidité se déploie en agrandissements successifs qui se remplissent de la simplicité complexe de son propre vécu. Confrontant hommes et actions, hommes et espace et plus que tout, hommes et hommes (ces hommes dont l’existence même semble remettre en question celles des autres), Véronique aborde dans ses films beaucoup de questions qui nous troublent. Les films cernent ces moments auxquels nous sommes sensibles (ceux que l’on a tendance à oublier ou que l’on refuse presque de voir). Ils s’emparent de ces fragments de vie avec une intense préoccupation, permettant au spectateur de ressentir la force des émotions qu’ils recouvrent, et cherchent à pénétrer ces éléments de signification que trop souvent nous voulons ignorer. C’est dans ces moments-là que les films atteignent leur niveau d’expression le plus élevé et le plus émouvant, le niveau où le non-dit se révèle, devient l’écho silencieux entre conscience et inconscience – lieu de nombreuses interrogations dont les réponses sont piégées dans les contreforts de la mémoire. Les voix surgissent en murmures éclatants, à la recherche d’une pertinence que les mots ne peuvent plus décrire mais que les images rendent immensément cohérente. Des images maîtrisées avec une telle précision qu’elles seules semblent douées de parole. Comme si la simplicité des structures filmiques devenait l’unique rempart contre les larmes insaisissables qu’elles contiennent, résonances d’un cri retentissant, qui, comme de la poésie pure, reste en nous pour longtemps.

 

Texte initialement publié par le cinéma Spoutnik (Genève).

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